Le phénomène LE PEN

Ce texte a été transmis à la presse en octobre 1986. Certains titres l’ont repris.

Réflexion sur un fait de Société « Le phénomène LE PEN »

Les thèses défendues par Jean Marie LE PEN, pour inacceptables, honteuses qu’elles soient rencontrent de plus en plus d’échos auprès d’un certain nombre de Français. C’est un constat que chaque jour l’on peut faire. Est-ce pour autant, en cela, une véritable adhésion ou simplement la résultante de la non-réponse à des inquiétudes, à des insatisfactions ou le reflet d’un Monde fait de laxisme, d’injustice, de compromissions ? En un mot un phénomène de ras le bol ?

C’est une question que l’on peu se poser.

Sur le plan politique, chacun de prendre position, à chaud, sous le coup de la passion, sous le coup de la crainte de voir une partie de sa clientèle échapper. La majorité, à travers ses différentes composantes, s’inquiète, essayant de faire « front » en taisant le vrai débat. L’opposition quant à elle joue l’attentisme en préférant seulement mettre en évidence les divisions qui existent dans le camp adverse.

Cette manière de traiter le problème n’enrichit pas le débat et n’apporte pas beaucoup d’espoir : un peu plus de vide, c’est tout. Ce vide qui permet à Jean Marie LE PEN d’exister, de prospérer. Ce vide au lieu de propositions sérieuses, concrètes. Cela alors qu’à gauche comme à droite il y a des hommes de qualité, c’est sûr. Ce vide qui amène et, c’est ce qui doit apparaître inquiétant, bon nombre de Français à suivre des voies dont on connaît les dangers.

L’impression qui semble le plus nettement ressortir est que les hommes politiques, les médias, les citoyens, dans leur ensemble, réagissent comme des médecins – qui seraient en l’occurrence coupables – administrant de l’aspirine ou un autre médicament à un patient sans d’abord rechercher la cause de ses maux.

Il faut inverser le cours des choses et, pour ce faire, que chacun ait le courage de considérer la part de responsabilités qui lui revient dans le cas présent :

- La classe politique en agissant avec plus de lucidité, moins de volonté électoraliste, moins de cette démagogie dont elle qualifie les propos de Jean Marie LE PEN. En redonnant une vie réelle au Parlement, au rôle de chaque député qui ainsi apportera la sensibilité politique, économique, sociale de sa circonscription lors des débats, lors des votes. Cela au lieu de suivre les seules consignes de son groupe parlementaire. Attitude qui provoque l’étouffement de la réalité politique de la France profonde. La classe politique qui doit montrer l’exemple, tracer des voies nouvelles alors que bien souvent elle ne respecte aucune éthique, qu’elle ne dénonce pas, et couvre même parfois, les agissements délictueux de certains de ses pairs.

- Le monde économique qui ne réagit, au gré des changements conjoncturels, qu’en termes de rapports de force, d’esprit corporatiste sans recherche d’un véritable consensus alors que le Pays est en pleine crise et que le chômage gagne encore du terrain.

- Le monde des médias qui, pour continuer à exister, s’exprime avec mesure, prudence et discrétion, pour ne pas déplaire et qui participe ainsi, à peu d’exceptions près, à bâillonner l’information.

- Les citoyens eux aussi dont la responsabilité collective est impliquée. Il leur faut réapprendre le sens de la responsabilité individuelle et abandonner cette indifférence égoïste en fonction de l’implication ou non de leurs propres intérêts par rapport aux grands faits de notre Société.

S’il en est ainsi, peu à peu, le « marché artificiel » de Jean Marie LE PEN disparaîtra. 

Pour revenir à la référence médicale, ce dernier est à considérer comme le « furoncle pernicieux » de la Nation française.

Il s’agit donc, en même temps qu’on le vide de sa purulence, de recréer les conditions d’un rétablissement de la santé générale de la patiente.

A ce moment -là on pourra peut-être dire que LE PEN aura été un « mal utile. » A ce moment-là seulement.