Sécurité Sécuritaire SARKOZY 2002 Un rappel des réalités

Courrier à   Monsieur Nicolas SARKOZY

24 novembre 2002

 

Monsieur Le Ministre de l’Intérieur,

Je suis avec beaucoup d’intérêt, un à priori favorable mais avec beaucoup de vigilance, l’entreprise volontariste de Monsieur le Premier Ministre concernant le chantier en cours de la décentralisation.

Ceci dans la mesure où la volonté exprimée a pour ambition «d’aller dans le sens d’une plus grande  démocratisation de nos institutions, vers plus de proximité dans la conduite des politiques intéressant  les citoyens.»

Luttant contre la montée des abstentions, je ne peux qu’adhérer à cette démarche, dans la mesure où elle peut être effectivement de nature à ramener les électeurs vers les urnes. Ces derniers étant respectés, dans les différentes régions, dans leurs spécificités d’identités culturelles, cela pour le bien de tout le Pays.

Pour autant votre attitude et vos prises de position, au sein du gouvernement, me posent problèmes.

Elles me semblent, en effet,  poser des limites, être à mes yeux en contradiction avec les souhaits et la volonté exprimés par Monsieur Le Premier Ministre et Monsieur Le Président de la République.

J’ai le souci, comme vous et comme beaucoup de Français, de voir appliqué le principe de «l’impunité zéro.»

Cela à tous les niveaux de la Société.

Or pour éradiquer la violence, vous agissez sur les conséquences et non sur les causes.

Là où il faudrait parler de sécurité, vous faites du «sécuritaire».

La violence que l’on connaît et que je combats dans la vie de tous les jours trouve, vous le savez vous-même,  le plus souvent, son ferment dans le sentiment d’injustice qui habite bon nombre de laissés pour compte d’une France qui les a oubliés.

Ce sentiment procède également du regard porté par les «humbles» sur ceux qui devraient  leur servir d’exemple.

Cela de quelque bord qu’ils soient.

Pour qu’il y ait «impunité zéro» j’aurais souhaité que vous intégriez dans vos propositions, ce qui me semble n’être qu’équité, et qui est une de mes demandes pour assainir la vie politique : «rendre inéligible à vie tout élu ayant été impliqué et condamné dans le cadre de la gestion de fonds publics avec recherche de profit personnel

Dans un autre domaine vous regrettez, comme moi, le manque de participation des citoyens, des jeunes en particulier, aux différents scrutins. (votre intervention sur France2)

Or, dans le même temps, vous refusez de donner une suite à  la demande que je vous ai présentée, comme à tous vos prédécesseurs, «d’ouvrir le débat sur la reconnaissance du vote blanc».  Cela alors que deux députés viennent de déposer des projets de loi dans ce sens. Cela alors que le séisme du 21 avril dernier, qui aurait pu avoir des conséquences catastrophiques, n’est pas si loin.

Autre niveau de questionnement de ma part.

Il est certain qu’une décentralisation, une véritable régionalisation peut permettre de lutter contre la globalisation de l’économie et ses errements.

Or, dans les réformes que vous souhaitez mener concernant les «modes de scrutins»  vous envisagez, pour les élections régionales, de relever les seuils permettant  à une liste de se maintenir au second tour ou de fusionner avec une autre.

Vous annoncez, en fait la condamnation, le musellement des «petits partis» des «listes régionalistes» qui pourtant devraient apporter leurs sensibilité à la mise en place de ce que Monsieur Le Premier Ministre dit avoir la volonté d’entreprendre.

Vous préparez, en fait, la «globalisation de la vie politique»

Vous le savez, actuellement les élus ne représentent, dans la réalité des chiffres qu’environ 35 à 40% de l’ensemble des citoyens.

Avec ce que vous souhaitez instaurer vous allez générer une nouvelle démobilisation des électeurs et mettre en place, pour demain, les conditions de la montée potentielle de violences de ceux qui ne sentiront pas représentés, pas écoutés, pas respectés.

Est-ce le rôle d’un Ministre de l’Intérieur ?

Je suis un ardent défenseur du concept de prévention dans tous les actes de la vie.

Aussi je me permets de vous poser la question suivante : «Gouverner étant prévoir» est- ce dans cette perspective que vous entendez mettre en place un… «régime sécuritaire»?»

Je vous assure, Monsieur Le Ministre, de l’expression de ma  considération.

Gérard GAUTIER

COURRIEL : blanccestexprime@wanadoo.fr