Mort de Michel Rocard: « un homme d’une profonde morale » pour Jean-Paul Huchon (*)

La mort, trop souvent, redonne toutes les vertus à celui qui disparaît.

Il est regrettable que pour rendre hommage à Michel Rocard et à « sa profonde morale » que ce soit Jean-Paul Huchon un homme qui en est tant dépourvu qui le fasse.

 Le décès tragique de la fille de proches amis me révolta.

Ce drame m’amena à rédiger,le 4 juillet 1989, une lettre-ouverte à Michel Rocard alors premier ministre.

« Elle s’appelait Florianne.

Elle avait tout juste 22 ans.

L’âge de tous les espoirs, normalement.

Espoirs qu’Elle n’avait plus.

TUC, Elle était, pour 1.500 francs.

Statut tellement peu valorisant, en ce beau pays de France du bicentenaire,

qu’ Elle n’a pas pu supporter plus longtemps.

Du haut du pont d’Armor, dans le vide, Elle s’est jetée.

Pendant ce temps, Vous, l’Homme d’Etat, le Chef du Gouvernement,

Monsieur Rocard, de quoi vous préoccupiez-vous ?

Vous tentiez de sauver la mise, de demander l’amnistie

pour tous vos collègues empêtrés dans de sales affaires peu ragoûtantes,

de fausses factures et autres caisses noires électorales.

Il est vrai, vous l’avez vous-même déclaré, que vos pairs étaient «réduits»,

de quelque bord qu’ils soient, «soit à la fraude ou à la mendicité»…

Elle s’appelait Florianne.

Avec ses 22 ans, ses 1.500 francs, Elle était à la limite d’en être réduite à cette dernière perspective.                                                                       

Elle n’a pourtant, Elle, profité que d’un seul privilège.

Celui de partir en fraude…

Ayez une pensée pour Elle, Monsieur Rocard.  

 Ce billet est paru dans le courrier des lecteurs de Ouest – France. Il  m’a valu de nombreuses lettres très touchantes, pathétiques pour certaines émanant de familles ayant connu ou pressentant la possibilité de mêmes drames.

Je n’ai jamais eu de réaction de Monsieur Rocard.

Saint-Brieuc 3 juillet 2016

(*) Titre Lettre de l’Express 3 juillet 2016